lundi 20 avril 2009

Vestige

C'était une soirée de fin de printemps, pas encore vraiment l'été, un peu pluvieuse et nous étions invités à dîner chez B. Je me souviens de la dispute que nous avions eue juste avant. Pas méchante, ça ne l'était jamais, mais qui nous avait fâchés et nous restions muets l'un vis à vis de l'autre. On verrait bien qui aurait le dernier mot. Comme souvent. Sans doute la cause de la dispute était-elle tout à fait futile. Comme toujours. A un moment de la soirée alors que je fumais à l'extérieur, il est venu me rejoindre. J'avais froid et il m'a tendu son pull. Il était plein de ces petits gestes là. Je l'ai passé et il m'a dit "il te va très bien, il est à toi". La dispute était bien entendu oubliée.

Ce matin, alors que je triais des affaires afin de donner ce dont je n'ai plus envie ou besoin aux bonnes oeuvres, cette histoire m'est revenue très clairement à la vue de ce pull. J'avais complètement oublié les circonstances dans lesquelles il m'avait été donné, bien que je sache bien entendu de qui il venait, et que je le porte encore régulièrement.

Le cerveau a cette capacité extraordinaire de réussir à conserver ces petites choses qui, des années plus tard, ont encore une signification. Ces jolies histoires qui font que la vie a un sens, ces anecdotes qui nous font exister au milieu des autres.

dimanche 19 avril 2009

Persepolis

J'ai déjà parlé ici de l'admirable travail de Marjane Satrapi et de son Poulet aux prunes. Il était donc évident que je cède à la tentation de l'oeuvre majeure de MS à savoir Persepolis. J'en attendais beaucoup. D'abord parce que j'avais adoré ce que j'avais lu d'elle mais aussi parce que la critique était unanime quant à la qualité de l'ouvrage.

Sur le dessin rien à redire, on aime ou pas. Moi j'adore ce trait simple et pas forcément très précis. Mais tellement expressif. Par contre, j'ai (un peu) eu du mal à rentrer dans l'histoire. Sans doute l'ai-je commencée à un moment un peu difficile mais quand même. Cependant, une fois entré dans l'ambiance le livre est à la hauteur du précédent.

Marjane Satrapi nous conte donc en BD sa vie, depuis sa plus tendre enfance sous le régime du Shah d'Iran puis la révolution islamique, ses études en Europe, son émancipation, sa révole quotidienne contre le non sens des règles du régime mais aussi plus tendrement sa vie au milieu des femmes telles que ses amies, sa mère, sa grand mère. Et la restitution de ses souvenirs y compris de sa naïveté d'enfant est extrêmement intelligente et touchante. On y aborde certes des problèmes graves tels que les droits de la femme ou les libertés individuelles, mais jamais on ne sombre dans l'instruction à charge contre le régime ni même le misérabilisme. Marjane Satrapi sait trop bien que le problème de cette région du monde est bien plus complexe qu'une simple idéologie, et cela transpire dans son récit.
Au final, une oeuvre intelligente, instructive, pleine de tendresse et qui mène à la réflexion. Bref à ne pas manquer pour qui aime le genre.

Marjane Satrapi - Persepolis

mercredi 15 avril 2009

Autoritarisme chez Com.com


Je déteste devoir faire preuve d'autorité. Ou plutôt non, je déteste que les gens me détestent. Longtemps j'ai cru qu'il fallait être gentil et écouter les gens pour qu'ils m'aiment bien. Et puis, sans doute touché par la grâce super-nannyenne (Super Nanny étant mon programme TV préféré, je viens d'en voir un épisode absolument subjuguant qui a sans doute inspiré quelque peu ce post) je me suis rendu compte que non, tout compte fait, qui aime bien chatie bien. Pire, l'humain aime qu'on lui fasse mal et ne respecte que celui qui le remet (vertement) à sa place.

J'ai donc appris à devenir sec, cassant et autoritaire, parfois même presque craint de certains. Ca me peine parfois, parce que je sais que ceci m'empêche d'être "le bon collègue copain avec tout le monde". Mais finalement, je vis avec ça et assez bien même. Le "management" comme il convient d'appeler ce que je fais ne souffre pas d'à peu près, il faut taper dans le tas. Et si parfois j'ai encore des sursauts de "s'il te plait tu veux bien m'aimer bien au travail et me le dire", je dois dire qu'en général, la paix absolue que j'ai gagnée avec certains me fait dire que j'ai choisi la bonne voie.

Aujourd'hui par exemple (en dehors de Super Nanny c'est bien cette situation qui m'a inspiré ;-) ) je fus pris à partie par une horde furieuse de collègues incompris et mécontents d'une décision qui, loin de les pénaliser, les touchait dans ce qu'ils ont de plus précieux : leur ego. J'ai d'abord eu la tentation de les écouter, les plaindre et leur dire que "bien sûr ma brav'dame que voulez vous qu'on y fasse" pour ensuite en prendre un pour taper sur l'autre tant l'agressivité et la mauvaise foi me donnaient la gerbe. Zen l'Olive ... je n'ai fait que déplacer la discussion, arguant de je ne sais quelle urgence. Ce qui me permit de préparer, perfide que je suis, tous les contre-arguments possibles et imaginables. Et convoquer moi-même la réunion. L'attaque, sourde et rampante de la meute était bien préparée... Mais la défense imparable. D'abord je coupe la parole. En m'excusant. Je dois prendre possession du terrain, je ne peux pas laisser un millimètre aux opposants. D'autant qu'ils sont quand même une vingtaine et que parler en public (qui plus est en anglais) n'est pas vraiment mon activité favorite (quoique, mais j'y reviendrai dans un autre post com.comien) Oui avant de discuter, je dois préciser quelques points. Innocemment. Mais je sais que je coupe l'herbe sous le pied de la moitié de ces jeunes post-pubères. Qui finalement ne posent que des questions basiques, voire se rendent ridicules. J'ai même surpris quelques-uns d'entre eux retourner leur veste, me remerciant de ma franchise et de ce "qu'on fait pour eux" (sic) et le tout s'est terminé dans la plaisanterie. Les hautes sphères, ayant eu vent de la révolte, me gratifièrent d'un BRAVO chaleureux et sonore lors de mon retour du combat.

Ce genre de situation, au delà de l'anecdote montre bien combien l'aspect communication dans l'entreprise est important. Parce que finalement, je pense avoir pêché par trop de confiance lorsque j'ai préparé la première mouture. Et que quelques minutes auraient suffi à éviter l'amorçage de la bombe.

MAIS

Force est de constater que c'est justement là que l'on gagne du respect. Je reste convaincu qu'à éviter les conflits et les échanges de points de vue, on en perd son autorité naturelle et son statut. In fine, loin d'être un Machiavel en puissance, les circonstances m'ont juste permis de me prouver que non seulement je pouvais me battre, mais aussi gagner à la loyale.

lundi 13 avril 2009

Jour de lessive



Calculer et faire du retroplanning est chez moi une seconde nature. Ainsi je laisse constamment mon cerveau en veille, lui laissant le soin de mettre à l'agenda la prochaine coupe de cheveux chez le coiffeur (toujours un samedi matin et pas plus que toutes les 5 semaines afin d'éviter l'apparence trop évidente des cheveux blancs), le nombre de yaourts à acheter en fonction de la consommation quotidienne (un le matin et un le soir, celui du matin étant obligatoirement sans morceaux (sinon je vomis) goût nature si mon petit déjeuner se compose d'une banane, au citron ou à la vanille s'il s'agit d'un biscuit, le vanille étant réservé aux jours où le biscuit est au chocolat, le citron pour les biscuits nature) et donc par voie de conséquence le nombre de bananes à acheter le samedi (en général deux, une pour le lundi, une pour le mercredi sauf les semaines spéciales comme celle de Pâques où il n'y aura banane que le mardi, ceci ayant des conséquences sur le nombre de yaourts natures à posséder dans le frigo comme on l'aura compris) et la réserve de biscuits nécessaires (il en faut pour deux semaines afin que cela ne me perturbe pas, pas plus sinon je les mange pour résorber le stock, pas moins sinon je recalcule sans cesse quand je risque de tomber en panne).

De même il faut planifier les lessives à l'avance. En général on en fait une ou deux par week-end. Enfin cela dépend de la saison. En hiver, le linge sèche lentement alors il faut espacer. En été c'est mieux, on a pas besoin de planifier le séchage. Mais toute de même. Vu qu'il faut lessiver le linge de maison chaque deux semaines (et ne pas louper l'échéance sinon la machine est trop petite et il restera du linge sale à laver qui perturbera le reste de ma semaine), le clair tous les quinze jours, le foncé environ une fois par semaine, et les draps toutes les deux semaines (sauf utilisation intense :o) et là on fera une exception en fermant les yeux) la planification startégique de lessive est compliquée. En même temps les mois de printemps sont super bien pour ça avec les jours fériés, on a des séances de rattrapage. Sans oublier le repassage. Car on ne laisse pas traîner le linge propre et sec, on le repasse et on le range (dixit Maman). Tout ceci a bien évidemment une influence sur le stock de lessive à posséder (c'est un peu comme les yaourts, la lessive). J'aime acheter la lessive. C'est un événement chaque fois que je termine un bidon. D'ailleurs je scrute toujours par transparence mes bidons de lessive afin de voir si le niveau baisse à l'allure souhaitée. [Pour qui me connaît, il n'aura pas échappé que ce TOC (c'en est un que j'assume) est le même que celui que j'ai avec les stylos à bille, n'utilisant que ceux dont le niveau d'encre est visible, afin d'en vérifier l'usure, impatient que je suis de le terminer, et d'en recommencer un autre....] Mais comme je lessive peu (j'ai quand même pas une famille nombreuse) je suis frustré de ne pas pouvoir acheter plus souvent de lessive. Enfin si j'en achète quand même, plein, des différentes, pour le noir, les couleurs, les températures hautes, en tablettes, liquide ou poudre, ou alors quand il y a une promo "inratable" (je suis quand même un peu radin hein? ) ... et j'utilise "selon" ma logique de "ce qui est mieux pour". Voilà, on prend son pied comme on peut.

Les plannings lessive et yaourt ne seraient rien s'ils ne se mêlaient pas à toute sorte de calcul de temps de trajet, jours de sortie (qui ont une influence catastrophique sur l'agenda des menus de la semaine (peu ou prou la même chose chaque semaine)) ou encore moment où l'on doit faire le plein de la voiture (en fonction, on l'aura compris des déplacements certains mais aussi, et c'est plus compliqué, des impondérables). Et tout le reste.
Au début on vit avec. Puis on s'efforce de chasser cela, de se libérer, de ne pas remonter deux fois depuis le garage pour vérifier si la porte du frigo est correctement fermée, de ne pas rebrousser chemin pour vérifier la cafetière électrique, et tout le reste, tout ce qui pourrit la vie (je n'ai pas d'autre mot que pourrir, mais si on le comprend au sens premier du terme, c'est le sentiment que tout ceci laisse). Car on se rend compte qu'il n'y a pas de fin. Mais c'est bien là le problème. La fin. Car immédiatement, ces obsessions sont remplacées par d'autres ... et de nouveau, il n'y a pas de fin. Alors on décide de vivre avec et même de faire partager aux gens qui comptent pour soi. Qui comprennent ou pas, qui acceptent généralement.
Je vous vois ricaner, mais faites attention que ça ne vous arrive ...

dimanche 12 avril 2009

Keep on moving

Hier soir, alors que j'étais chez D³ et son ami, je réalisais soudainement qu'en me plaçant derrière la fenêtre, j'étais exactement en face de mon ancien bureau. J'essayais donc d'entre-apercevoir quelque chose au travers des vitres fumées mais hélas, cela n'est pas possible. J'ai travaillé dans cet immeuble près de 18 mois, assez pour y avoir un passé. Et je laissais, pendant une dizaine de minutes de silence et de solitude, mon esprit divaguer vers ces presque lointains souvenirs. Mon big boss C. que j'ai aimé profondément comme un second père et qui m'a tant appris, mes deux fidèles employés J. et M-P. qui ont été là aussi bien dans les bons moments que lors des coups durs. Mes voisins de bureau M. que je verrai dans une semaine, L. que j'execre tant il a pu se foutre du monde et tous les autres, disparus ou que je réussis à revoir ou croiser lors de diverses occasions sociales.

Et tout cela m'a rappelé combien cette époque était bénie des Dieux. Combien il était facile, alors de progresser dans ce qu'on appelle la "carrière" professionnelle. Rien à voir avec mon quotidien d'aujourd'hui. Sans oublier la respectabilité et le salaire de ministre qui allaient avec. Cela dit, rien n'est éternel et les meilleures choses ont une fin. Oui c'est assez banal comme remarque mais le dire et le savoir font toute la différence. Et je ne regrette pas la fin d'un système, simplement les bons moments vécus et la remise en question imposée par le changement.


J'ai quand même la nette impression d'être, après deux ans, enfin reconnu pour ce que je peux apporter à mon employeur, je veux dire autrement qu'une menace, un ectoplasme hystérique menaçant à chaque instant de faire effondrer le fragile édifice. Seulement le désir et la volonté d'intervenir là où je le peux et la compréhension que les choses dites le sont parce qu'elles doivent l'être, et non dans le but de destabiliser ou choquer je ne sais qui. Somme toute, il apparaît évident que gagner cette confiance est un combat de tous les instants alors que je l'avais acquise si naturellement auparavant.


En rentrant, je profitais de l'exceptionnelle douceur de la nuit pour rouler doucement vitres ouvertes et je réalisais que toutes ces considérations ne me sont finalement dictées que par la vacuité sentimentale dans laquelle je me trouve ...

dimanche 5 avril 2009

Unlimited


On s'attache à de petites choses, futiles. Un de mes fournisseurs d'accès "mail" m'annonce que le domaine qu'il gère va cesser d'exister. C'est une de mes premières adresses e-mail que je vais ainsi abandonner. Ce n'est pas tant la perte d'une habitude virtuelle qui me chagrine (au contraire, je vais aussi abandonner beaucoup de spam et gagner du temps), mais plutôt la nécessité de retourner mes vieux messages, de les effacer ou de les recopier, les sauvegarder ailleurs. Et la preuve tangible du temps qui passe. Du coup je réalise que les espaces "illimités" dont on dispose sont de formidables fosses à souvenirs. Je suis remonté au début des années 2000 et j'ai relu des choses que j'aurais sans doute à jamais oubliées si je n'avais pas été obligé de faire le tri aujourd'hui. Ainsi j'ai retrouvé des amis perdus de vue, des déclarations d'amour, des colères, des insultes, des accusés de réception d'achats d'objets depuis longtemps jetés, des photos, des noms presque oubliés. Le tout me plongeant dans une délicieuse nostalgie, une sorte de satisfaction d'avoir vécu des histoires et d'y avoir laissé une trace.